Hermadan - Shiraz: 1180 km - 5 jours

Attention, pavé!
Redevenus duo franco-français, nous décidons de bousculer nos appendices d’habitudes en optant pour un convoyage diurne, de façon à apercevoir les immensités montagneuses autrement qu’en nuances d’un bleu-gris-noir mystérieux mais allèchement suggestif. Une nouvelle fois, un car nous conduit jusqu’à notre prochaine étape – Isfahan –, nous permettant de poursuivre le comparatif des parfums de jus de fruits Golshan, probablement sponsor officiel des transports collectifs longues distances, puisque constituant systématique de la goûter-box distribuée.



Nous arrivons à Isfahan à la tombée de la nuit et rejoignons les mètres carrées rétribués d’une guest-house, non sans avoir auparavant sollicité des locaux par le biais de couchsurfing ; en vain. Nos estomacs chuchotent famine, et nous poussent à étudier les différentes possibilités susceptibles de mettre fin à leurs timides caprices avant de prendre la direction du dortoir. Une visite des échoppes de proximité s’impose donc, puis nous retrouvons la cour intérieure de l’hôtel. Les couteaux sont parés à étaler le fromage en barquette acquis pour l’occasion, sur le demi mètre carré d’une sorte de pain préparé sous nos yeux. La première bouchée est fatale, nous forçant à constater, impuissants, à notre propre coup-de-foudre : de son nom nan-e sangak, le pain en questions pose sa griffe sur nos affects gustatifs, habituellement patriotes convaincus de la suprématie française dans le domaine, sujets fréquents au spleen culinaire depuis le départ. Ses courbes, générées par le tapis de galets brûlant qui en permet la cuisson, jouent avec la lumière tamisée pour le plaisir des yeux pendant que son alliance de croquant et de mie gourmande gâte notre palet. La baguette n’a qu’à bien se tenir.
Nous nous promenons dans la partie nord de la vielle ville, alternance de bazars longilignes où se succèdent les spécialités, du secteur des tapis à celui des épices, en passant par celui des tee-shirt ou d’ateliers rudimentaires de travail du cuivre. Visiter l’Hakim Mosque constitue le premier objectif de la matinée, en attendant le second, lequel consiste à rejoindre Mohammed, couchsurfeur overbooké victime de son activité sur le site, qui s’est proposé de nous faire profiter de ses connaissances architecturales. Ainsi guidés, nous visitons Ali Qapu Palace, lequel nous interpelle notamment par son rapport entre intérieur et extérieur : peu de pièces closes, souvent petites, mais nombre d’espaces simplement couverts dont la seule limite avec l’extérieur est marquée par la ligne que dessine l’ombre portée du plafond sur le sol. Le dernier étage est celui de la salle de musique, rendue acoustiquement performante par ses murs et son plafond voûté en dentelles de craie, sculptés directement dans la masse. Un couple de cyclistes canadiens, vadrouilleurs longue durée, se joint à nous. Nous traversons le square dans sa largeur pour rejoindre Sheick Loftollah Mosque, carré parfait relié à la place par un dispositif subtil de rotations, mosaïque sublime percée de moucharabiehs joueurs de lumière, espace intimiste réservé à l’origine au roi et à sa cour. Assis à même une verte pelouse ombragée, un déjeuner glouton et constitué de lavash – autre sorte de pain local –, d’un kilo d’une sauce à l’aubergine atteinte de viscosité chronique, d’un régiment de concombres nains et de yaourt, clôture notre rencontre.






 





La journée se prolonge par la visite d’un autre palais, entouré cette fois-ci d’un parc luxuriant marqué par le gracieux élancement de deux bassins dont la disposition axiale complète la symétrie parfaite proposée par le bâti. Comme 90% des monuments visités, des échafaudages garnissent un pan de façade. Nous maugréons gentiment, désespérant – et cela même l’est tout autant – de voir nos clichés sublimes systématiquement entachés de quelques pantalons salis, tas de gravats et squelettes métalliques tubulaires. Nous retournons dans le square. Un type nous aborde de quelques fulgurances francophones appris sur le tas, puis nous invite à poursuivre la conversation autour d’un thé à l’intérieur du magasin de tapis qui l’emploie. La proposition tombe à pic : le soleil est bas et ne suffit plus à chauffer convenablement nos bras découverts, orphelins de quelques manches longues que ce soient, toutes enfermées dans nos sacs restés à l’hôtel. La première tournée est sympathique, l’occasion de faire connaissance avec deux de ses jeunes collègues ; la deuxième marque le retour de la parano du touriste lambda qui pense systématiquement qu’il s’agit là d’une tentative d’extorsion de fond déguisée ; la troisième ridiculise la deuxième en nous voyant invités par Habid – un des deux collègues sus-évoqués – à crécher dans la maison familiale. Bilan : du thé à gogo, des types sympas, une soirée en perspective dans un foyer iranien, un exposé enrichissant sur les tapis à base d’un « something like this » commerçant et démonstratif d’une récurrence intérieurement hilarante, un endroit au cœur de la vieille ville où nous pouvons laisser nos 30 kilos et par la même, se libérer de la crainte permanente d’assommer une fillette de 10 ans distraite ou d’écraser sa grand-mère flageolante contre un poteau. Jonathan réclame une bière. Sale gosse ; c’est l’Iran tout de même.



Nous arrivons chez Habid dans la soirée. La maison est spacieuse et offre un confort semblable à celui que nous connaissons, entre cuisine équipée, volets roulants et plusieurs coquettes salles d’eau. Le séjour, immense, est simplement habité d’un vaste canapé, d’un écran plat aux dimensions grandiloquentes, et de trois tapis laissant à peine apparaître le ton clair et neutre du carrelage. Ici vivent ses parents et lui-même – surtout ses parents en réalité, lui préférant sillonner le globe sac sur le dos et barbe de 200 jours. Nous mangeons en compagnie de sa sœur, de son mari ingénieur et de leur petite fille, fusée à deux jambes pas plus haute que le rebord supérieur de la table. Le repas est copieux et subtilement cuisiné, dévoré sans excès de manières au son et images de BBC Iran, émise depuis l’Angleterre et reçue illégalement via une parabole : les chaînes nationales sont qualifiées de menteuses, suspendues aux volontés et orientations gouvernementales. A l’instar de facebook, théoriquement bloqué mais utilisé par beaucoup, cette pratique nous est qualifiée comme des plus courantes. La nuit est comme toutes les autres, bienfaitrice et insouciante, simplement commandée par la fatigue et le besoin de sommeil qui s’y rapporte.


9 heures plus tard, nous quittons notre refuge d’un soir non sans remercier ses occupants sédentaires et retournons dans la vieille ville pour y dépenser les plus belles heures de la journée. Acte premier ; l’Imam Mosque : sublime, et une entrée a priori remarquée, puisqu’un journaliste de la chaîne de télévision locale nous demande de revenir sur nos pas puis de réapparaître. D’une classe naturelle, nous nous exécutons, marchant lentement, feintant – sans non plus en rajouter, tout est une question de mesure – la découverte des premiers espaces, luttant avec acharnement contre une envie de sourire envahissante lorsque nos expressions du visage maîtrisées dans la difficulté sont l’objet d’un gros plan. Acte second ; la Jameh Mosque : sublime elle aussi mais dans une version moins tape-à-l’oeil, touchée par les affres du temps. Entre les deux, une déambulation hasardeuse sous les arcades d’un bazar sans fin voit la naissance d’un projet clandestin dont voici le synopsis : si, comme nous, vous désapprouvez les conditions de vie des mannequins d’Isfahan, vous pouvez prendre contact avec l’un d’entre-nous, lequel vous expliquera les détails d’une opération nocturne d’envergure baptisée « mannequin, une condition, un destin »  – ou « c’est pas gentil de faire du mal à un mannequin », le choix n’est pas arrêté – actuellement en préparation.









Après nous être régalés de sangak et de fromage sur la mezzanine du magasin de tapis en compagnie des employés, nous terminons notre journée à l’Imam Square, considérant le blanc de son marbre contenu par la centaine de voûtes illuminées comme un générateur de liens sociaux impressionnant, susceptible d’égayer notre soirée de sa magie. Nous y revoilà donc, en cobayes volontaires réjouis de tester la véracité des propos qui précèdent. Un artiste un brin illuminé – ou visionnaire, mais le doute est permis – en pince sérieusement pour nos études et fait écho à leur simple évocation d’un monologue philosophico-timbré. Le deuxième interlocuteur n’est pas un seul mais une famille, s’adonnant à l’activité si populaire ici que le pique-nique et équipée des éléments indispensables à son bon déroulement : une bouteille de gaz pour faire chauffer les cinq litres d’eau chaude apportés, une quantité suffisante de victuailles pour pouvoir en proposer aux invités d’un instant, et un tapis susceptible de pouvoir accueillir l’ensemble de tout cela. Aziz, sa sœur, sa mère, sa tante, sa cousine ainsi que son meilleur ami libèrent un coin du tapis, nous offrant simultanément la possibilité de goûter à l’harmonie ambiante, animée du comique passablement développé du dernier nommé. Nos sacs sont au magasin, lequel va fermer. Partons. Isfahan est merveilleuse ; faîtes passer le message.



Nous atteignons Yazd le lendemain matin et profitons une nouvelle fois du potentiel à devenir lits des assises métalliques de la gare routière, avant de nous mettre en quête d’une guest-house recommandée. Alors que nous abreuvons de ce liquide américain gazéifié à la robe brune dans la cour de ladite guest-house, des yeux bridés nous apparaissent, criant de familiarité. Ces yeux sont ceux de Junya – que tous ceux qui ne se rappellent pas de sa précédente apparition dans le récit, à peine soulignée, soient privés de saucisson, fromage et baguette sept jours durant, de telle sorte à communier avec nous à distance, et ainsi recueillir notre pardon. Nous passons le reste de la journée en sa compagnie, celle de son savoir-vivre et de son improbable kilo de pop-corn, sillonnant les ruelles labyrinthiques du centre historique de la ville au simple moyen du flair et de la boussole. Le silence nous enveloppe, rarement perturbé par quelques individus en mouvement dont nous ne devinons ni la provenance, ni la destination. Point de fenêtre ; seules quelques portes, opaques, suggèrent la présence de cours intérieures autour desquelles s’organisent les habitations. Les ruelles étroites, parfois devenues passages, ménagées par les murs de terres cuites, se jouent des excès du soleil. Une troupe de militaires ! En position. Un chacun. Ils ne sont pas armés. Et m****, des sourires niais plutôt que du sang. Pour passer pour des héros, c’est encore raté…





La fin de journée approche ; nous posons nos fessiers endurcis sur un muret, nous portant acquéreurs d’une bouteille d’eau puis de glaces aux parfums mystérieux, bien que prétendument vanille et chocolat. L’endroit est bien trop dégagé pour que nous demeurions trois plus d’un quart d’heure, dans ce pays que l’Iran, au milieu de l’incarnation de la curiosité délicate que le peuple iranien ; deux d’entre eux viennent à nous. Les incontournables, âges, occupations, durées de séjour et statuts maritaux rapidement évacués, apparaissent alors des sujets moins conventionnels, nés de la conjugaison des véritables questionnements personnels, de l’impression partagée qu’ils peuvent ici trouver leur place, dopés par les mines réjouies apparues de part et d’autre. La lune a pris place dans le ciel ; nous nous retrouvons à 20 kilomètres de la ville, dévorant un kebab dans une usine fabriquant de l’huile, invités par l‘un des amis du duo, second de l’entreprise - ne nous demandez pas pourquoi, nous pouvons simplement répondre que nous nous entendons bien. Le trajet retour est un grand n’importe quoi d’évocations diverses relatives à ce polémique endroit que le dessous de la ceinture, lequel ne bénéficie pas, que l’on soit de Yazd ou de Nantes, des mêmes libertés d’agir. 5 mecs dans une voiture, faut nous excuser.


Le réveil sonne, synonyme de départ imminent vers Persepolis. Nous quittons l’igloo de toile, déplié sur le toit de l’hôtel pour la nuit sans qu’il nous soit demandé un seul rial. John fait sa séance d’abdos tout en dominant le paysage de toiture-terrasses, de coupoles et de tourelles, magnifié par les rayons rasants du soleil – sa nouvelle carrure l’exempte désormais d’alternance entre effort physique et réconfort visuel. Le luxe, sous sa version la moins onéreuse qu’il soit.

A peine remis de la précédente, nous voilà sujets à une nouvelle séance de marchandage, puisque foulant à nouveau le bitume d’une gare routière. Mohammed, alors accoudé au guichet, nous assiste dans notre tâche en qualité de traducteur bénévole. Lui se rend également à Shiraz pour le montant qui nous est proposé initialement, comme le prouve son billet ; ce même montant qui suscite chez nous une indignation factice mais non moins exprimée pour essayer d’en faire baisser le montant. Notre dernière cartouche : une tentative larmoyante d’apitoiement par l’évocation de notre condition d’étudiants, voyageurs de longs mois bien peu fortunés. Echec cuisant. Nous poursuivons la discussion avec Mohammed, décidément intéressé et intéressant au-delà des poncifs de présentations. Lui est originaire de Persepolis, à quelques kilomètres de Shiraz, et comme beaucoup de ses compatriotes, semble avoir presque le double de printemps que les 35 qui le séparent de son année de naissance. Il ne se rend plus à l’université depuis quelques années mais en attendant ce premier emploi, si difficile d’accès, il nourrit sa soif d’apprendre de livres, et, comme il semble être souvent le cas en Iran, se dit ainsi étudiant. Des diplômes, beaucoup de diplômés, mais, nous indique t-il, un chômage qui touche 50% de la population…

Les places qui nous sont attribuées dans le car sont voisines, et permettent ainsi de filer la discussion, tout en traversant paysages arides quasi-lunaires et zones d’habitations qui semblent avoir fleuri par le simple fruit du hasard. Longer Persepolis, aller jusqu’à Shiraz pour reprendre un bus le lendemain et visiter la cité Antique – Persepolis, mais deux fois le même mot dans la même phrase, ça l’fait pas – lui semble bien trop stupide pour nous laisser faire : son foyer nous est ouvert pour la nuit, à quelques centaines de mètres de la dernière nommée. Notre réponse, c’est oui, un de ces oui qui réveille le pétillant de nos yeux, un de ces oui rassuré quant à nos capacités à laver nos chemises au savon de Marseille pour en limiter les odeurs de sueur, un de ces oui teinté par l’idée voyeuriste du franchissement futur de sa porte d’entrée, un de ces oui gourmands d’intégrer un foyer iranien en son coeur. Nous quittons le car au bord de l’autoroute, où s’arrêter ne pose pas plus de problèmes que de mettre un clignotant et de tourner légèrement le volant. Le frère de Mohammed et un de ses amis nous attendent dans une des voitures familiales. 10 minutes. Nous y voilà. Mohammed habite le pavillon de plain-pied qui borde la route, son frère la maison sur deux-niveaux qui fait face à celle de ses parents, accessible depuis un chemin de terre et dans laquelle nous entrons une fois déchaussés. L’atmosphère est joyeuse, synonyme d’une arrivée attendue. Bien que certains possèdent leurs propres chez-eux, vivent et cohabitent ici une dizaine de membres de la famille, toutes générations confondues. La maison des parents est le foyer de tous. Les femmes cuisinent, les enfants rivalisent de bruit avec la télé, laquelle occupe les hommes, assis à même le sol dans la pièce centrale de la maison. Le chef de famille, atteint d’une maladie paralytique, est positionné en face de l’écran, sur le fauteuil roulant qui permet de le déplacer. Agriculteur à la retraite, il supporte financièrement la quasi-totalité des âmes qui animent alors ses murs de leurs pas, pour la plupart sans travail ni ressources. Non qu’il soit riche, simplement que le mot famille a, en Iran, bien plus d’importance que tous les autres.


L’esprit un soupçon embrumé de prénoms et liens de parenté, nous nous installons dans cette pièce, dos au mur, sur l’immense tapis qui caresse nos nu-pieds de sa douceur. Tous communiquent avec nous dans une euphorie générale extatique, utilisant des médiums différents, du dessin à la préparation du dîner sur le sol bétonné, du bricolage d’anglais à la traduction plus savante de Mohammed ou de sa nièce. En écho aux questions dont nous sommes l’objet, les photos qui garnissent nos sacoches s’en échappent, façon de leur offrir un morceau de notre foyer, quand eux nous offrent la chaleur et l’intimité du leur. Nous investissons une autre pièce pour prendre le repas, entre membres de la gente masculine. Il s’agit de la chambre du père – impossible à deviner, il n’y a ici aussi que des tapis. Au menu, probablement le même quasi tous les soirs : une sorte de galettes de pomme de terre fris, du fromage, des tomates, du concombre et du lavash. La soirée se prolonge dans la salle principale jusqu’à onze heures environ, animée de sujets hétéroclites : politique, famille, mode de vie, histoire,… Honte à nous lorsque nous nous apercevons en savoir à peine davantage que notre hôte sur Napoléon – lequel, évoqué alors, nous n’avons  toujours pas identifié parmi tous les homonymes. Nous traversons la cour, le chemin de terre, puis accédons à la propriété de Mohammed. Ni plus ni moins de meubles, mais encore des tapis, et nombre de photos de famille qui retiennent notre attention et s’attirent les foudres de notre moquerie de bas-étage, la faute a des effets et des retouches informatiques diaboliques. Envoûtés par l’accueil qui nous est réservé, les moments qui nous sont donnés à vivre, mais, malgré tout, toujours perturbés par les goûts photographiques locaux, nous déplions nos couches dans un coin de la pièce principale.





Promesse faite de lui envoyer un mail illustré d’Australie susceptible d’être suffisamment avare en octets pour ménager sa connexion internet bruyante, payante, et en même temps monopolisatrice de la ligne téléphonique, nous quittons Mohammed d’une poignée de main franche et reconnaissante. Il nous faut poursuivre notre route, qui, comme d’autres fois, aurait pu s’arrêter au-delà d’une nuit. Tentons d’oublier ; ce qui nous attend n’a rien de répugnant : Persepolis, cité Antique précédemment citée bien peu avare en liens à l’Histoire, affiche l’ocre de ses ruines au-delà des sapins. L’ami Wiki renseigne à merveilles. Pour ce que nous et nos cinq sens en doublon pouvons en dire : perchés sur le flanc de montagne qui surplombe le palais, l’imagination se défait de ses brides, efface la troupe de japonais sous ombrelles du champ de vision, et reconstruit piliers et toitures, fait repousser palmiers et orangerais, remplit d’eau bassins et fontaines jusqu’à vous faire traverser les siècles et vêtir vos pensées de sons, de mines irisés et d’habits colorés. Ben ouais, l’Iran, aujourd’hui si conservative, si hostile à tout occidentalisation exacerbée de sa société et à toute libéralisation des mœurs, est l’un des berceaux de l’Humanité – sur un ton solennel et satisfait en façade, à la limite d’être insupportablement hautain, mais s’il vous-plaît, ne nous demandez pas de développer l’idée au-delà de la phrase même.


Nous atteignons Shiraz l’après-midi de la même journée, laquelle ne se révèle pas des plus fertiles en moments trop-méga-cool, se résumant à la quête laborieuse de notre abri du soir. Un peu plus de 48 heures nous séparent du décollage – direction le Népal – qui doit nous arracher à ce pays dont on s’est sérieusement entiché. Environ la moitié est consacré à mettre en pratique, enfin, les conseils injonctifs des infirmières scolaires nantaises qui prêchent le sommeil, l’autre moitié étant partagée entre échanges répétés de petites coupures contre des milliers de rials, repas royaux à même notre chambre d’hôtel – il s’agit d’engloutir la quantité de suffisante de sangak pour s’en écoeurer, et ainsi le quitter sans douleur –, et déambulation au hasard des rues et sites importants, plus avares de bonnes surprises que ceux des villes précédemment visitées. A retenir : le spectacle dramatique du pigeonnage de touristes, pratique courante utilisée par des guides improvisés pour leur subtiliser quelques billets contre, il est vrai, quelques informations – jusque-là, rien de tellement émouvant. Malheureusement, il s’agit là de notre propre baptême – là, vous sortez vos mouchoirs – : un type nous aborde, se définissant comme guide mais étant lui-même étudiant et conscient du taux de remplissage de nos livrets A, il nous propose de nous faire visiter deux édifices pour le simple plaisir de faire plaisir. Tellement touchant et convaincant que nous baissons notre garde, habituellement infaillible. Passons sur les grossières similarités avec un magnétophone de l’exposé, la splendeur du mausolée visité et les détails de la manipulation protocolaire, mais ne mentionnons que le résultat : 40 rials de moins, pour soi-disant le rembourser d’un bakshish obligatoire qu’il aurait laissé pour nous dans une urne. A éviter désormais : les types qui nous abordent, se définissant comme guide mais étant eux-mêmes étudiants et conscients du taux de remplissage de nos livrets A, et qui proposent de nous faire visiter deux édifices pour le simple plaisir de faire plaisir.






Vous voulez une blague ? Admettons que oui. C’est l’histoire d’un pays où Titanic – vous savez, ce film bouleversant, inspiré du naufrage véritable d’un paquebot de croisière dans l’Antarctique, traitant de l’amour déluré et transgressif entre un blondinet sans le sou et une bourgeoise argenté – ne dure que 45 minutes... Que ce peuple obtienne la liberté qu’il mérite et évoque aussi souvent qu’il lui est possible de discuter avec les occidentaux, symbole de cette liberté, dans une discrétion de mise. L’Iran, c’est déjà fini, et ça, ça craint. Si le désert, peuplé de nomades, restera celui que l’on a vu en photos, ce qu’on en a vu nous suivra jusqu’à nos cheveux gris  – ou calvitie dans le pire des cas.

4 commentaires:

  1. Merci pour cette bouffée d'air chaud!

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  2. Pou ma part, je dois admettre qu'il me faudra me priver de pain, de saucisson et de fromage car le nom de Junya n'a pas vraiment fait écho dans ma tête. Et soyez sûr que je tiendrai ma promesse de jeûne, car cela fait déjà trois mois que je ne peux pas me délecter de telles saveurs, celles ci n'existant pas... en République Tchèque!
    Merci mille fois pour ce récit enivrant
    A très vite
    bisous mon colloc et johnny john
    Anne

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  3. de grands moments de plaisir et d'évasions à vous lire depuis le début de l'aventure.

    Mais à noter cette lecture spéciale aujourd'hui : en direct du 2b en rendu ac L.Paillard. Oui, ici, le quotidien est tout aussi chaleureux..

    Merci à vous, et bravo

    Edouard

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  4. Trop fort le pain, je veux le même !! ^^ C'est vraiment cool de rencontrer des gens aussi sympathiques qu'accueillants. ( Petits veinards ! lol) Je me demandais mais c'est vraiment idiot ce que je vais dire (enfin je pense), avec ces changements de villes, de paysages et tout vous arrivez à garder la notion du temps !?
    Au prochain bout de chemin,pleins de bisous. ;)

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